Soumission à l'urgence
Même si elle ne vient pas de la pression directe de l'actionnaire, la dictature de l'urgence a fait des ravages chez Fret SNCF. Auto-infligée, elle s'est manifestée par une opposition forte, -manifestation caractérisée de résistance au changement-, entre "le fret du présent au fret du futur [71]".
Au nom du "fret du présent", elle a généré un foisonnement de projets contradictoires, voire concurrents, souvent mal définis dans leurs objectifs, censés porter leurs fruits dans des délais relativement courts, délais jamais tenus, et résultats rarement mesurés et obtenus.
L'opposition entre le court terme et le long terme a relégué dans le futur toute tentative de structuration de changements en profondeur, alors que l'amorçage de ces derniers exigeait qu'ils s'ancrent immédiatement dans le réel, cela avec d'autant plus d'intérêt qu'il n'existait pas d'autre voie pour apporter quelques premiers résultats tangibles. On ne mesurera jamais combien la plupart des actions issues d'une approche à courte vue, conduites au nom du pragmatisme et du concret, et s'autoproclamant du court terme, loin de freiner sa chute, ont précipité l'agonie d'un système parti en vrille.
[71] L'expression était celle d'un haut dirigeant de Fret SNCF. Il ajoutait qu'il préférait "les œufs de caille aux œufs d'autruche, pour ne pas mourir guéri". Sans rejeter formellement la nouvelle représentation du fret ferroviaire, il n'en faisait aucun usage pour piloter les actions du moment, lui donnant implicitement le statut de représentation du fret du futur, dont il fallait entreprendre la construction une fois consolidé le fret du présent, autant dire aux calendes grecques.
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